la cybersécurité française à la recherche de talents.
9 novembre 2023
Les cyberattaques sont désormais reconnues comme des risques business prioritaires. Pas étonnant quand on se penche sur leurs coûts ! Selon une étude d’IBM Security, le coût moyen d’une cyberattaque était de 4,35 millions d’euros en 2022. Face à ce contexte inquiétant, l’écosystème français de la cybersécurité s’organise et recrute.
Comment définir la cybersécurité ? L’exercice est moins facile qu’il n’y paraît, car derrière la notion de cybersécurité s’inscrit en creux l’univers mouvant de la cybercriminalité. Pour saisir l’importance de l’un, il faut appréhender les risques de l’autre. Yann Bonnet est Directeur général délégué du Campus Cyber, le « lieu totem de la cybersécurité en France » qui rassemble depuis février 2022 les principaux acteurs nationaux et internationaux du domaine. Pour lui, le constat est sans appel : « Le contexte cyber est inquiétant. La menace augmente. C’est un réel risque économique et social. » En effet, les chiffres sont évocateurs : les attaques par rançongiciel (logiciel qui réclame le paiement d’une rançon pour rétablir l’accès à un ordinateur ou à des données) et les cas d’espionnage informatique augmentent en France et dans le monde, 821 instructions de l’Anssi ont été comptabilisées en France en 2022 ; près de la moitié des PME françaises ont déjà été concernées par le fléau ; un hôpital est attaqué chaque semaine…
« en finir avec l’image du geek à capuche ».
Voitures connectées, services publics dématérialisés… une société numérisée se révèle donc vulnérable quand interviennent les attaques des criminels 2.0. Une préoccupation d’autant plus grande que « nous n’avons pas les ressources humaines nécessaires pour y faire face, s’inquiète Yann Bonnet. Il faut faire un important travail de pédagogie et de vulgarisation pour que chacun maîtrise les gestes d’hygiène numérique, mais il faut aussi former et recruter des talents ! Plus de 15 000 postes sont non pourvus en France et ce chiffre sera amené à augmenter si rien n’est fait. »
L’ancien directeur de cabinet du directeur général de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information souhaite : « changer l’image de la cybersécurité, en finir avec l’image du geek à capuche. On ne recherche pas que des matheux, des ingénieurs, des personnes qui ont fait de longues études. Aujourd’hui, 56 % des métiers de la cybersécurité recrutent à Bac +2 / +3. » Des métiers variés, l’ANSSI en dénombre une cinquantaine, allant de la technique à la géopolitique en passant par le droit et la communication. Par conséquent, les profils recherchés sont, eux aussi, hétérogènes. Dans cette course aux talents, une caractéristique saute aux yeux : la sous-représentation des femmes (11 %). Le défi de l’attractivité passe enfin par les imaginaires, par l’engagement émotionnel. Yann Bonnet rêve d’un scénario similaire à celui de la DGSE qui a vu le nombre de candidats grimper en flèche suite au succès de la série Le Bureau des Légendes.
la massification des effectifs.
Derrière les questions d’image et d’attractivité, un objectif : former plus ! « Car le seul moyen de combler la pénurie est de former davantage de personnes aux métiers de la cybersécurité, tous niveaux confondus », abonde l’ancien de l’ANSSI. Concrètement, il faut non seulement remplir les rangs des formations existantes, mais aussi créer de nouveaux cursus qui sauront répondre aux nouveaux besoins, « les cybercriminels ont toujours un coup d’avance », déplore Yann Bonnet. Plus qu’ailleurs, les professionnels doivent faire preuve d’agilité et se former en continu.
Pour parer à l’urgence, le Campus Cyber travaille en priorité avec des profils en reconversion, par exemple des personnes en fin de parcours dans les systèmes informatiques. D’autant que le processus peut être très rapide : « Il faut imaginer des formations accélérées comme les bootcamps ou des concours nationaux, explique le Directeur général délégué du Campus Cyber. Ces modèles ont démontré leur capacité à susciter des vocations pour des étudiants ou des profils atypiques, à faciliter les reconversions, et au final, à pallier la pénurie de talents. »
« il va falloir s’adapter en permanence ».
Ce n’est donc pas une surprise de voir cette problématique inscrite dans les trois piliers du Campus Cyber : « former, innover, fédérer ». Dans ce laboratoire à taille réelle, on réfléchit aux réponses à apporter aux enjeux de la cybersécurité, et surtout, on les expérimente ! Un modèle qui passe par l’innovation, la gouvernance, les ressources en commun et les transferts de technologie. Des défis immenses et transverses ! « La dynamique de la cybersécurité va s’accentuer, en même temps que la prise de conscience de son importance. Il va falloir s’adapter en permanence, avec, en première ligne les métiers de la cybersécurité, qui vont continuer à être en tension et à demander plus de main d’œuvre », conclut Yann Bonnet.
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