le cerveau, partisan du moindre effort – par Lisa Delmoitiez.

La bonne nouvelle, maintenant : la paresse est un mécanisme naturel chez l’être humain, au même titre que la respiration, la digestion et l’envoi d’e-mails en oubliant la pièce-jointe. C’est inévitable.

l’homo sapiens est homo flemardus.

La paresse, c’est comme la mauvaise haleine du matin : ça concerne tout le monde. Il y a juste ceux qui l’assument, et ceux qui la cachent.

Le flemmard assumé, c’est le collègue qui vient vous demander ce que vous voulez manger à la pause déjeuner alors qu’il n’est pas encore 10h. Un conseil : répondez-lui. L’ignorer ne fait qu’accroître son potentiel de distraction. À 10h15, il vous enverra le menu du restaurant qui a ouvert à côté du bureau. À 10h30, les avis Google des clients et à 11h, la liste des allergènes et le signe astrologique du cuisinier. Le collègue procrastinateur est comme l’univers, l’infini ou Donald Trump : il n’a aucune limite.

Plus pernicieux est le collègue cachotier qui fait semblant de travailler. Il répond à des e-mails en pleine réunion, trie ses fluos par couleur pendant votre meeting zoom… bref, il a l’air occupé. Mais les neurosciences sont formelles : le cerveau humain ne peut se concentrer que sur une tâche à la fois et pas plus de 4 heures par jour. Discuter avec un collègue tout en répondant à un autre sur son téléphone, c’est comme parler la bouche pleine. Non seulement, ça ne sert à rien, mais en plus… ça dégoûte tout le monde.

faites la paix avec votre cerveau paresseux.

Dans son ouvrage “votre cerveau n’est pas programmé pour être productif”, Jérémy Coron explique que notre propension à en faire le moins possible est non seulement normale, mais elle est vitale. Au cours de l’évolution, la priorité a toujours été la survie, pas la productivité. L’économie d’énergie est littéralement ce qui nous a maintenus en vie. Quelle bonne nouvelle… J’adore les neurosciences, surtout quand elles nous poussent à en faire moins. Comme la fois où un chercheur a dit que nos ancêtres prenaient 5 kilos en hiver pour survivre en cas d’hiver trop rude. Je ne sais pas vous, mais moi, mon cerveau a décidé de continuer à honorer les habitudes de mes ancêtres à chaque saison de la raclette. C’est important les traditions !

flemmard et fier de l’être.

Vous savez maintenant que votre cerveau est partisan du moindre d’effort. Comment, alors, faire de votre paresse innée une force ? D’après Jérémy Coron, il est contre-productif de se faire violence à coup d’heures supplémentaires. Il faut, au contraire, créer un environnement rassurant pour faire comprendre à notre cerveau que tout va bien, qu’il peut sortir du mode survie pour s’épanouir. Donc, la prochaine fois que votre patron jugera votre partie de basket avec la poubelle comme panier et ses mémos chiffonnés comme ballon, répondez-lui ça : « je ne procrastine pas, je rassure mes neurones ».

Et pour continuer sur le sujet de la neuroscience qui déculpabilise, le podcast Votre Cerveau de la neuroscientifique Samah Karaki conseille de se libérer de l’objectif de performance pour laisser au cerveau la liberté de créer sans crainte du jugement. C’est tellement réjouissant tout ça, je commence à penser que ce sont des cerveaux qui ont écrit tous ces articles pour nous dire de leur foutre la paix…. Toujours est-il que le message est clair : pour travailler mieux, LAISSEZ VOTRE CERVEAU TRANQUILLE. C’est pas moi qui le dit, c’est mon cerveau. 

par Lisa Delmoitiez.

Lisa Delmoitiez est une auteure et humoriste belge de 32 ans, elle mène de front une carrière sur les planches (son spectacle “Remontada” est en tournée en France et en Belgique jusqu’à fin 2024) et de chroniqueuse radio dans l’émission “La Bande Originale” sur France Inter, elle a également participé à l’écriture du podcast littéraire et humoristique “Imagine ça parle de ça”.