Le slow a-t-il sa place en entreprise ?
11 mars 2021
Slow working, slow management, slow business… Inscrite dans la lignée du mouvement slow food créé au début des années 80, la tendance du « slow » (« lent ») n’a cessé de croître ces dernières années. Alors que le monde entier est confronté à une crise économique et sanitaire, l’éloge de la lenteur est-elle aujourd’hui salutaire au monde de l’entreprise ? La réponse en débat avec deux experts du sujet.
Oui, donner du temps c’est reconnaître l’autre
Loïck Roche, directeur général de Grenoble Ecole de Management et docteur en Philosophie.
Pour Loïck Roche, directeur général de Grenoble Ecole de Management et coauteur du livre, « Le slow management : Eloge du bien-être au travail », il est essentiel de replacer l’homme et la femme au centre de l’entreprise. Alors que l’entreprise privilégie encore trop souvent le court-termisme, le culte de la performance et que les occasions de management à distance se sont généralisées avec la crise du Covid-19, elle se doit au contraire de reconstruire l’humain.
Les managers, souvent pris par leurs tâches quotidiennes et encouragés par l’essor des nouvelles technologies, ont trop peu de contacts avec les membres de leur équipe, ce qui nuit aux relations humaines et impacte les performances. Il ne faut pas oublier que le moteur de l’entreprise, c’est l’Homme. « Pour être productif, un salarié doit en effet se sentir bien dans l’entreprise. Or, le temps est essentiel au bien-être du collaborateur », affirme Loïck Roche.
Dans cette optique, « les managers doivent donc accepter d’accorder du temps à leur équipe en dehors des réunions, des appels téléphoniques, de la lecture des
e-mails, pour réellement essayer de comprendre ce qui se joue chez les hommes et les femmes qu’ils dirigent ».
💡 Comment ? En multipliant les occasions de rencontres et de contacts, en prenant le temps d’écouter les collaborateurs, en les impliquant dans la vie de l’entreprise… Remettre les hommes et les femmes au centre de l’organisation, c’est pour les managers donner à leurs collaborateurs ce qu’ils n’ont pas, ce qu’ils ont de plus précieux, à savoir du temps. Et donner ce que l’on n’a pas, c’est en réalité la définition que Lacan donnait à l’amour.
De même, dans Le Petit Prince, Antoine de Saint Exupéry rappelle que c’est le temps donné à sa rose qui fait son importance.
« De manière analogue, c’est donc bien le temps que le manager est capable de donner aux membres de son équipe qui va faire que ces derniers se sentent reconnus et importants au sein de l’entreprise. »
S’ils le comprennent bien intellectuellement, trop de managers peinent encore aujourd’hui à l’appliquer. Ils ont parfois l’impression que ralentir en accordant des plages de temps à l’autre est paradoxalement une perte de temps, alors que c’est un levier de bien-être et de motivation essentiel aux collaborateurs. Pour augmenter ses performances et sa compétitivité, l’entreprise doit reconstruire de l’humain et donc changer son rapport au temps.
Non, l’organisation doit avancer plus vite
« Le pire ennemi d’une entreprise, ce ne sont pas ses concurrents
mais sa lenteur »,
Bertrand Duperrin, Head of People and Delivery chez Emakina.
Pour Bertrand Duperrin, le concept du « Slow » est un sujet dans l’air du temps depuis un moment, mais qui prend encore plus d’ampleur en cette période de pandémie. Avec le chômage partiel, certains dirigeants se sont en effet rendu compte que leur entreprise était plus réactive avec quelques maillons de moins dans la chaîne de management.
Pourtant, « le slow est une mauvaise réponse à une bonne question ».
En effet, l’interrogation est légitime car il n’est pas possible de demander aux collaborateurs d’aller indéfiniment plus vite et d’en faire toujours plus au risque qu’à un certain moment la machine casse.
En parallèle, force est de constater que le pire ennemi d’une entreprise, ce ne sont pas ses concurrents mais sa lenteur. A travers cette pandémie, on voit que ce sont les entreprises qui ont su se transformer rapidement en termes d’organisation, voire de business model, qui s’en sortent le mieux aujourd’hui.
« La bonne réponse est donc de savoir si c’est le mode d’organisation de l’entreprise qui va lui permettre d’aller plus vite ou si c’est le fait de presser toujours plus les individus qui la composent. »
Aujourd’hui, le débat actuel sur la bureaucratie le prouve, nous avons des organisations qui ralentissent l’action et la décision. Ainsi, ces dernières sont encore trop lentes à décider, souvent peu enclines à l’innovation et elles demandent en contrepartie aux collaborateurs d’aller plus vite pour compenser le temps perdu.
« La solution est de donc faire avancer l’organisation et le business plus vite, en leur donnant plus de rythme et d’agilité, sans pour autant presser davantage les individus. »
Il est donc essentiel de travailler sur l’approche organisationnelle de l’entreprise, en accordant plus d’autonomie aux managers ou aux collaborateurs et en retirant tous les freins qui peuvent les empêcher d’avancer. Ainsi, ce qui fait aujourd’hui le succès d’une entreprise, ce n’est pas sa capacité à avoir des idées plus vite que ses concurrents mais bien d’être la première à pouvoir les exécuter.
Et plus encore :
Managers, managés ou en recherche d’emploi… Le temps est une denrée rare pour chacun d’entre nous. Pourtant, c’est rarement le temps lui-même qui manque, mais plutôt la façon de l’optimiser. Zoom sur ces méthodes qui vous feront gagner du temps ! 💪
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