faire gagner en productivité ou apporter des compléments à la mission initiale » explique, avec pédagogie, Sophie Dancourt. Frédéric Comte, patron de Bibus, PME dans l’industrie, témoigne également dans la presse : « Je ne m’impose pas d’embaucher un quota de seniors par an. Je recrute les personnes que m’offre le marché et qui correspondent à mes attentes. Cela dit, quand j’observe tous les recrutements que j’ai pu réaliser parmi les cinquantenaires, je suis plutôt satisfait. » Autre témoignage, celui de Dominique du Paty, fondatrice de la TPE Handiréseau. Ayant embauché un directeur financier de 65 ans, elle justifie son choix ainsi : « Il avait eu un poste important, où il avait à gérer un service, des tableaux de bord, un budget. C’est comme s’il avait eu à gérer une TPE. Il a, de plus, tout de suite pris en main le logiciel parce qu’il connaissait bien ce genre d’outil et il s’est parfaitement adapté à nos besoins. » laisser parler les chiffres pour changer de regard. Nathalie Breton, DRH de Feu Vert, fait le lien entre la stratégie RH et la performance de l’entreprise. « Nous sommes convaincus de la valeur ajoutée des seniors. (...) Le taux d’absentéisme et le turn-over sont très faibles chez nos salariés seniors. » Chez Expectra, les consultants en recrutement sont conscients de leurs responsabilités. Vanessa Levassort de la spécialité supply l’explique ainsi : « Notre rôle en tant que recruteur est de combattre les préjugés au quotidien. La combinaison de profils variés et d’expériences diverses est un atout. Cela favorise l’innovation, la résilience et la compétitivité. Cette approche inclusive et diversifiée permet de répondre aux nouveaux défis de la Supply Chain tout en capitalisant sur les forces individuelles de chaque profil. » innover sur les conditions de travail. Pour attirer et fidéliser à tout âge, les conditions de travail doivent être pensées sous l’angle intergénérationnel. Au-delà de la rémunération, c’est l’ensemble du cadre de travail qui peut être revu. Vanessa Levassort suggère ainsi d’offrir « la possibilité d’être à temps partiel ou de bénéficier d’horaires flexibles. Les politiques de santé et de bien-être sont de vrais plus pour faire la différence, tout comme les plans de formation. » Aux côtés du Club Landoy, le groupe L’Oréal est à l’origine d’une charte en 10 engagements, sur la place des 50 ans et plus en entreprise, désormais ralliée par 136 signataires. L’Oréal, justement, a renforcé ses actions relatives à l’ergonomie et propose par ailleurs un bilan de prévention pour détecter des problèmes de santé, pouvant notamment être en lien avec la ménopause. Elle offre également des services d’accompagnement et de formation pour préparer sa retraite ou maîtriser les outils numériques par exemple. adapter l’expérience de recrutement. Magali Kueny, sur la spécialité office, constate une certaine homogénéisation des attentes : « Initialement, ce sont les jeunes générations qui ont introduit de nouvelles exigences comme le télétravail, la proximité du domicile, la flexibilité des horaires ou les avantages annexes. Mais peu à peu, les autres ont suivi le mouvement pour arriver à un alignement. » Sandrine Dorbes rappelle, de plus, que les incontournables du recrutement évoluent. « Certains éléments sont désormais rédhibitoires pour toutes les générations : la lettre de motivation, les processus de recrutement trop longs ou l’opacité sur le salaire. Il faut savoir évoluer pour vivre avec son temps et attirer tous les talents. » Mais si homogénéisation des attentes il y a, cela n’empêche que certains attendus dans l’expérience sont plus ou moins forts en fonction des âges. « Pour les profils de 30 ans, on met en avant l’environnement de travail, le dynamisme, la capacité d’innovation, l’ambiance collaborative. Les jeunes aiment les nouvelles expériences et recherchent des défis stimulants. Ils sont souvent sensibles aux questions sociales et environnementales et sont attirés par des entreprises engagées » détaille Vanessa Levassort. Comité Colbert, association réunissant 95 maisons de luxe, a lancé un challenge sur TikTok pour mettre en avant les artisans et leurs gestes en allant toucher les plus jeunes sur leur réseau de prédilection. accompagner les carrières. À tout âge, les collaborateurs sont en attente d’écoute et de conseils. Caroline Blondet aime ainsi à rappeler sa vision du métier : « Forcément, avoir en entretien un senior, prend plus de temps : mais j’aime creuser au maximum leur parcours, leurs aspirations pour pouvoir les mettre en avant auprès des clients et augmenter leurs chances d’être retenus. » Et qui dit accompagnement, dit montée en compétences. Pour répondre à la pénurie des talents, mais aussi favoriser une diversité de profils, les entreprises intergénérationnelles proposent des plans de formation adaptés. Sophie Dancourt illustre ce point avec les aéroports de la Côte d’Azur qui s’engagent à réserver une enveloppe de 5 % du budget pédagogique de formation à la population senior. Sophie Cottin rappelle, quant à elle, l’intérêt de former, quand les profils viennent à manquer. « Si le marché est très tendu, l’entreprise est prête à privilégier les soft skills et à former le candidat sur le poste ou la technologie en question. C’est particulièrement vrai pour les métiers de technicien où tout évolue très vite. » des solutions… aux actions. Alors que la pénurie des talents reste un sujet central, l’heure est à l’ouverture. Si, jusqu’à présent, ils pouvaient être tentés par l’entre-soi, les employeurs sont désormais sommés de mixer les parcours, les compétences et les expériences de leurs collaborateurs pour faire face aux nombreux défis qui les attendent. Pour y répondre, beaucoup de leviers existent. Cela se joue en effet à plusieurs niveaux : sur le management, sur la communication, mais aussi sur le légal. Loin d’être un sujet réservé aux RH, il s’agit, au contraire, d’un enjeu où chacun a son rôle à jouer. La bonne nouvelle ? Toutes les conditions semblent réunies pour faire de l’âge un levier de performance pour les entreprises. Il n’y a plus qu’à. 19